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Féminicides : le naufrage de la grande cause nationale.

Depuis le début de l’année, les violences contre les femmes font à nouveau la une de l’actualité. Des femmes ont été victimes de leur conjoint ou de leur compagnon. Depuis le début de l’année, l’attitude de policiers ou gendarmes est pointée du doigt.

Ces drames insupportables révèlent une réalité. À Mérignac, entre autres dysfonctionnements, les policiers ne font pas remonter le non-respect de la mesure d’éloignement obtenue par Chahinez contre son mari, le Parquet classe les plaintes. Elle mourra brûlée vive en pleine rue. À Paris, après avoir probablement tué sa compagne, un policier, qui avait fait l’objet d’une première condamnation sur son ex-compagne, reste en cavale depuis 15 jours avec son arme de service.

On peut s’interroger si un agent de service dans la fonction publique territoriale aurait eu droit à la même clémence. La jurisprudence admet en effet que certaines infractions commises dans la sphère privée puissent faire l’objet d’un volet disciplinaire au niveau de l’établissement public employeur. C’est le cas lorsque les mentions portées au bulletin n° 2 sont jugées comme étant incompatibles avec les fonctions occupées (Article 5, 3°, de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983), également lorsque les faits portent atteinte à la réputation de l’administration (CE, 27 juillet 2006, n° 288911).

Ces faits révèlent combien l’administration d’État banalise et minimise encore trop les violences contre les femmes. Cela pointe combien l’Administration peine à comprendre le caractère systémique de ce phénomène mortifère qu’est le féminicide. Au niveau de la communication, le gouvernement montre combien il est en décalage avec la société qui n’en peut plus de cette litanie quotidienne de meurtre.

Que l’on ne se trompe pas, il n’est pas question de jeter en pâture à la vindicte populaire les gendarmes et policiers. Il n’y a pas de raisons de penser qu’il y ait plus de conjoints violents policiers que parmi les banquiers ou les chômeurs.

Ce qui choque, c’est comment l’institution « couvre » ses agents, qui ici, ne prennent pas les plaintes, ici ne mènent pas l’enquête, là, considèrent ces faits comme minimes, là encore, ferment les yeux sur les agissements de ses collègues.

Ce qui choque, c’est comment le gouvernement fait le choix de l’institution au détriment des femmes et comment il banalise ce phénomène bien particulier que l’on nomme féminicide. Ainsi, Gérald Darmamin, pourtant prompt à défendre son bilan, force statistique contre la délinquance à l’appui, s’interdit d’évaluer le bilan de l’État contre les violences à l’encontre des femmes.

Chiffrons, quantifions, analysons et évaluons les politiques publiques face aux féminicides et les violences contre les femmes. Il s’agit là d’une grande cause nationale, n’ayons pas peur d’ouvrir les yeux, à commencer par ceux des ministres de la Justice et de l’Intérieur sur ce phénomène.

Car au final, ce que révèle l’attitude de nos forces de l’ordre vis-à-vis des féminicides, c’est comment on banalise encore les signaux faibles, qui, traités collectivement par les acteurs (Éducation, police, justice, mais aussi bailleurs, travailleurs sociaux, corps médical…), devraient permettre de détecter les situations dangereuses, enclencher une réaction adéquate et prévenir les drames. Voilà ce qu’aurait dû impulser une grande cause nationale si elle n’était pas restée au stade du marketing électoral.

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